Hommage à Jean-Pierre Putters, papa de Mad Movies

rjt avec JPP tournage time demon

Jean-Pierre Putters est décédé à l’âge de 79 ans. Fondateur de la revue spécialisée dans le cinéma de genre Mad Movies, il fut aussi un auteur prolifique, avec notamment la collection des Craignos Monsters consacrée aux monstres de série B.

Son ami Julien Richard-Thomson rend hommage à celui qui fut aussi son tout premier producteur …

 

rjt avec JPP tournage time demon
Avec JPP dans le rôle d’un policier… on attendait la cravate pour lancer la scène.

La disparition de Jean-Pierre m’a profondément touché, et d’ailleurs à en juger par les centaines de commentaires émus qui ont surgit sur les réseaux sociaux aussitôt la triste nouvelle connue, je n’ai pas été le seul. « JPP » a laissé des milliers d’orphelins derrière lui, amis ou simples lecteurs et cinéphiles…
Érudit, passionné de cinéma fantastique et gore, mais aussi réputé pour son humour potache et décalé, JPP a marqué le monde de la presse cinéma avec son magazine qui débuta pourtant sous forme d’un modeste fanzine… l’année de ma naissance (1972).
Comme beaucoup, j’ai d’abord connu JPP à travers son journal, que j’ai découvert adolescent, puis en m’installant à Paris j’ai eu la chance de le rencontrer et de devenir son ami. Récemment, j’ai redécouvert – en relisant une très vieille interview – comment nous nous sommes connus. Avant de lui proposer d’apparaître dans mon premier long-métrage Night of Vampyrmania, comme policier vampire, je l’avais contacté pour qu’il participe à un débat sur « la violence » que je devais animer pour une petite radio. Il avait accepté. C’était en 1993. Je lui avais rendu visite rue Mansard à la rédaction de Mad Movies, et ce fut le début de notre amitié et de notre collaboration sur plusieurs projets.

Il est devenu mon tout premier producteur en investissant une (petite) somme dans la production de Time Demon, une comédie fantastique, parodique et très « série Z » ; plus que des billets de banque, il consacra surtout beaucoup de temps au projet puisque, en plus de jouer deux rôles dans le film (un policier de dos, et un méchant soldat nazi), il assura une partie de la régie, offrant sa maison pour tourner plusieurs scènes. Nous tournions à quelques kilomètres de chez lui, dans une usine désaffectée repoussante de saleté.

JPP et Pascal Sellem (Time Demon 2)
JPP et Pascal Sellem (Time Demon 2)

Il nous prêta aussi ses deux voitures et la cave du magasin Movies 2000. Il remplaça même pendant une journée notre perchman ! Il faut dire que nous étions tous très polyvalents sur ce film, tourné avec des bouts de ficelle. Mon frère Blaise était mon assistant et jouait aussi un rôle, un nazi grimaçant – en duo avec JPP. Pourquoi toujours des rôles d’affreux salopards pour cet homme des plus sympathique, ne me posez pas la question ! Certains connaissent l’anecdote (qu’il raconte dans son livre Mad, ma vie) sur l’incident qui eut lieu pendant une manipulation d’armes, heureusement chargées à blanc. Un technicien lui tira dessus accidentellement avec une mitraillette, manquant de lui brûler le visage, technicien qui fut viré immédiatement du plateau sur ma décision : on ne s’en prend pas impunément à notre JPP !
A cette époque nous avions le projet de monter une vraie société de production Métaluna Productions , qui est d’ailleurs inscrite au générique de Time Demon, avec mon assistant Damien Granger (projet qu’il a finalement mené à bien, des années plus tard, avec un autre associé). Damien est devenu rédacteur en chef de Mad Movies. En 1998, JPP coproduisit ma version parodique de Jurassic Park : Jurassic Trash avec toujours nos amis Laurent Dallias et Dominick Breuil au casting. Puis il fit une nouvelle apparition dans Time Demon 2 dans des scènes qui hélas furent, pour la plupart, coupées au montage pour fluidifier l’intrigue.
JPP avait insisté pour que nous engagions d’ex stars du X dans nos films, je dois dire que j’essayais de modérer ses ardeurs (sans jeu de mots) mais cette stratégie nous valut quelques passages TV.

sur le tournage de Time Demon (1996) de gauche à droite, Damien Granger, JP. Putters, J Richard-Thomson
sur le tournage de Time Demon (1996) de gauche à droite, Damien Granger, JP. Putters, J Richard-Thomson

Plus tard, nous avons eu d’autres projets avec JPP notamment celui d’adapter sa collections de livres Craignos Monsters en série TV (mais Canal Plus a renoncé) ou même en fiction : nous avions commencé à écrire avant de nous apercevoir qu’il était difficile de situer l’action du film en France, les monstres en question étant trop américains, et d’abandonner.
On me demande souvent pourquoi je n’ai pas collaboré à Mad Movies. JPP me l’a proposé une fois, en 1998, pour une rubrique sur les séries Z, mais je n’arrive pas à me souvenir pourquoi cela n’a pas été suivi d’effet. En revanche, j’ai toujours refusé d’écrire des critiques de films car ce n‘est pas mon métier. En fait, nous avons collaboré une unique fois en presse : dans un numéro de son journal Metaluna, qu’il avait créé après avoir vendu Mad Movies à un autre éditeur, j’ai signé un shooting photo avec une très jolie pirate plutôt sexy.
En 2015 il m’a fait l’amitié de signer la préface de mon livre Mon cinéma de À à Z et d’intervenir dans plusieurs bonus accompagnant les éditions dvd de mes films. Il avait coutume de dire que j’étais le réalisateur le plus malchanceux du monde, en raison des déboires que nous avions pu rencontrer sur nos mini productions fauchées. « Quand le Créateur invente une nouvelle plaie d’Egypte, il la teste d’abord sur Julien » déclarait-il (dans Libération notamment, mais aussi dans ses bouquins quand il me consacrait un chapitre) Je lui rétorquais que face à des producteurs et financeurs peureux et souvent superstitieux, il valait mieux s’abstenir de raconter ce genre de choses mais il persistait, le bougre.

Je ne vais pas ici livrer tous mes souvenirs amicaux avec JPP, le but étant plutot de rappeler nos collaborations, mais je voudrais dire que Jean-Pierre était une personnes très attachante, accessible, simple (et très bon pâtissier ! Son premier métier).

Comme dit mon ami Rurik, il n’était jamais dans le paraître mais dans le faire, il était actif sans être démonstratif. Nous partagions la même passion pour le cinéma « mad » et impertinent, celui qui sort des sentiers battus.

 

Extrait de En dehors des clous : JPP à propos des premiers films de Richard-Thomson

 

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